Utilisation des produits phytosanitaires, où en est-on ?

La réglementation quant à l’usage des produits phytopharmaceutiques a beaucoup évoluée au cours des années passées et est toujours un sujet d’actualité. Nous souhaitons aujourd’hui faire le point sur ce qu’est un produit phytopharmaceutique, la réglementation en cours concernant ce type de produits et les évolutions majeures à venir. Cet article ne concerne pas l’usage de produits phytopharmaceutiques dans le milieu agricole, qui fait référence à une réglementation bien spécifique.

Produits phytosanitaires : de quoi parle-t-on ?

D’après l’article 3 du règlement (CE) n°1107/2009, les produits phytopharmaceutiques (PPP), appelés aussi phytosanitaires, sont des substances actives ou des préparations destinées à :

  • protéger les végétaux, ou les produits végétaux, contre tous les organismes nuisibles ou à prévenir leur action,
  • exercer une action sur les processus vitaux, pour autant qu’il ne s’agisse pas de substances nutritives,
  • assurer la conservation des produits végétaux,
  • détruire les végétaux ou parties de végétaux indésirables,
  • freiner ou prévenir une croissance indésirable des végétaux.

Ils comprennent les produits issus de synthèse chimique, ceux d’origine naturelle (extraits végétaux, animaux ou minéraux), les micro-organismes et médiateurs chimiques ainsi que les stimulateurs de défense des plantes.

L’interdiction d’utilisation des produits phytosanitaires : où en est la réglementation ?

Initiée en 2014 par le sénateur écologiste du Morbihan Joël Labbé, la loi « visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national », dite loi Labbé, avait pour ambition l’arrêt de l’utilisation des produits phytosanitaires dans tous les sites publics à partir du 1er janvier 2020.

Depuis le 1er janvier 2017, la loi Labbé interdit aux collectivités d’utiliser/faire utiliser des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts, forêts, promenades et voiries (sauf pour des raisons de sécurité …) accessibles ou ouverts au public.

© Jean-Luc et Françoise Ziegler – Biosphoto : Panneau d’informations sur des espaces entretenus sans pesticide dans la région du Finistère, Bretagne, France

Au 1er janvier 2019, l’interdiction s’est étendue aux particuliers. Les jardiniers amateurs ne peuvent plus utiliser ni détenir de produits phytosanitaires sauf ceux de biocontrôle, à faibles risques et autorisés en agriculture biologique. Hormis ces derniers, tous les autres produits phytosanitaires de la gamme amateurs sont interdits à la vente.

Cette loi a eu des effets positifs sur les volumes d’achat de produits phytosanitaires de synthèse en France puisqu’entre 2017 et 2018, la quantité vendue de produits phytosanitaires à usages non agricoles (hors produits de biocontrôle à faible risque) a diminué de 30%.

L’indicateur de suivi du plan Ecophyto, le NODU pour nombre de doses unités, montre également une diminution en zone non agricole de 25% entre 2017 et 2018. De plus, l’Office National des Forêts (ONF), impliqué par le passé dans des applications de glyphosate, a depuis octobre 2019 choisi la voie du zéro pesticide de synthèse pour la gestion des forêts publiques[1].

La loi Labbé comporte toutefois encore des limites qui laissent exemptes de son application certaines zones :  les espaces privés gérés par des structures privées, les espaces appartenant à des structures publiques dont l’accès est fermé au public, ainsi que les espaces ouverts au public qui ne sont pas considérés comme des espaces verts.

Ainsi, actuellement, la loi Labbé ne s’applique pas à certaines zones telles que : les terrains de sports, les hôpitaux, les cimetières, les parcs d’attraction, les campings ou encore les hôtels. Les espaces verts des particuliers gérés par des professionnels ne sont pas non plus évoqués dans la loi Labbé et ses extensions.

Face à ces limites, le gouvernement a annoncé en février 2020 sa volonté d’élargir la loi Labbé à tous les espaces en gestion privée et publique ouverts au public, par un projet de décret du Ministère de la transition écologique et solidaire sur un objectif de zéro pesticide en zone non-agricole.

© Jean-Michel Groult – Biosphoto : Traitement d’un abricotier en hiver avec un produit bio (huile végétale émulsionnée)

Alternative aux produits phytopharmaceutiques : le biocontrôle, fausse bonne idée ?  

Le terme « biocontrôle » est généralement associé à l’idée que les produits utilisés sont « naturels ». Les industriels en ont d’ailleurs fait leur principal argument de vente. L’exemple typique est celui de l’acide pélargonique. Cet acide gras que l’on trouve dans la membrane de végétaux, tels que le géranium, est contenu dans divers désherbants non sélectifs. Il en est de même pour les produits à base d’acide nonanoïque que l’on trouve notamment dans le colza.

Ces acides, dont l’impact est déjà avéré à l’état naturel, sont en général synthétisés chimiquement pour accroître leur efficacité. Ce sont donc de véritables biocides qui sont massivement synthétisés pour leur action désherbante ou insecticide. Il s’agit donc bien là avec ce type de produit de tendre à éradiquer une population considérée comme nuisibles alors que le principe du biocontrôle invite à sortir de cette conception erronée des écosystèmes puisque les nuisibles ont également leur utilité au jardin, en tant que source de nourriture notamment. Nous sortons alors du cadre de la lutte biologique basée sur la recherche d’un équilibre entre ravageurs et auxilliaires de cultures. Il est par ailleurs important de noter que ces produits sont non sélectifs et impactent donc tous les êtres vivants sur la parcelle traitée.

De plus, bien qu’ils soient qualifiés de « naturels », ces produits nécessitent l’usage de protections pour leur utilisateur équivalentes à celles nécessaires pour les pesticides chimiques : masque respiratoire, gants, combinaison et protection des yeux.

 Pour en savoir plus sur le biocontrole : http://www.jardinsdenoe.org/le-biocontrole/

 

Parmi les produits classés dans les produits « naturels » de biocontrôle, les matières actives les plus connues pour leur action insecticide ou anti-maladie sont les suivantes :

  • La pyréthrine : préparation à base d’extrait de plante, le pyrèthre, de la famille des astéracées.

Il a une action par contact avec le bioagresseur, il est donc inutile de l’utiliser en préventif. Il est cependant très efficace dans la lutte contre les pucerons et autres insectes parasites comme la piéride du chou.

  • Les pyréthrinoïdes : c’est la forme chimique synthétique dont la composition est la plus proche de la pyréthrine. C’est un insecticide que l’on retrouve notamment dans les anti-moustiques. Ils sont classés parmi les perturbateurs endocriniens.

La pyréthrine, forme naturelle végétale, comme sa forme de synthèse, les pyréthrinoïdes, sont cependant toxiques pour les organismes aquatiques et les animaux à sang froid.

Ces produits ne sont pas utilisables en agriculture biologique.

Le principe du biocontrôle peut donc être un allié certain au jardin si le principe de recherche d’équilibre est respecté. Dans le cas contraire, les intrants que représentent les produits de biocontrôle risquent d’impacter la biodiversité du jardin, contribuant à la perte de biodiversité dans un contexte déjà alarmant.

Bibliographie 
Pour plus de détails sur les produits de biocontrôle, consultez la liste officielle : https://info.agriculture.gouv.fr/gedei/site/bo-agri/instruction-2017-289
Partagez sur les réseaux sociaux :

Donnez votre avis