Le lierre grimpant, impopulaire malgré lui

Le lierre grimpant est victime d’une bien mauvaise réputation. Perçu à tort comme le « Bourreau des arbres » et un destructeur de murs, il possède en vérité bien plus d’un tour dans son feuillage et peut jouer un rôle central dans le développement d’un écosystème urbain, pour peu qu’on lui laisse sa chance.

© David Potter / Photoshot / Biosphoto

> Fiche d’identité

Le lierre grimpant, ou Hedera helix, réalise sa floraison en septembre-octobre et sa fructification entre mars et mai. Loin d’être un parasite, il utilise ses crampons pour se développer et capter un maximum de lumière et ne se nourrit qu’à l’aide de ses racines. Il peut vivre plusieurs siècles et ses feuilles peuvent persister jusqu’à 3 ans.

> Le gîte et le couvert pour la biodiversité

Luisantes et persistantes, ses feuilles constituent un abri de premier ordre pour beaucoup d’espèces de la faune sauvage.

De nombreux insectes s’y abritent et s’y restaurent : abeilles, guêpes et bourdons ainsi que des papillons comme le Citron, le Paon du Jour et le Vulcain qui y pondent leurs œufs. Le lierre offre aussi un refuge de choix aux auxiliaires du jardin : syrphes, araignées, coccinelles, chrysopes et hémérobes.

© Claude Balcaen / Biosphoto

Une espèce d’abeille sauvage ayant développé une spécialisation pour le lierre a même été découverte en 1993 : Colletes Hederae ou… Abeille du Lierre !

Du côté des oiseaux, y nichent notamment merles, grives et roitelets ainsi que le troglodyte mignon ou encore la Chouette Hulotte ! Les mésanges, moineaux et geais sont aussi friands de ses baies à la fin de l’hiver.

En plus de ses feuilles persistantes, le lierre présente à la fois une floraison tardive et une fructification très tôt dans l’année. Il constitue donc une source de nourriture de choix à des périodes critiques de l’année. Cela lui confère un double avantage pour de nombreuses espèces de la faune sauvage.

En effet, bien que toxiques pour l’Homme, ses baies abondantes sont très appréciées par de nombreux oiseaux qui s’en nourrissent à une période de l’année où les sources de nourriture sont encore rares.

D’autre part, les pollinisateurs profitent de son pollen et de son nectar tardifs, à une période où il ne reste que très peu de fleurs.

> Idées reçues

© Saverio Gatto / Biosphoto

Tordons le coup à quelques idées infondées :

  • Le lierre N’EST PAS un tueur d’arbres : le lierre est une liane, il a besoin du support des arbres pour se hisser et capter un maximum de soleil. Dans le cas d’un arbre malade ou trop vieux, le lierre peut prendre le dessus mais dans la plupart des cas, arbre et lierre fonctionnent en harmonie, le lierre protégeant l’écorce du gel ou des attaques. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que le lierre présente des périodes de floraison et de fructification si différentes : cela lui permet de ne pas concurrencer l’arbre sur lequel il se développe !
  • Le lierre N’ABAT PAS les murs : les crampons qui lui permettent de s’accrocher ne s’insinuent pas dans le bâti et ne fragilisent pas les murs. Au contraire, le lierre les protège et renforce la régulation thermique du bâtiment. Le seul risque est de laisser le lierre se développer sur un mur (ou un crépi) déjà en mauvais état qui risquerait de céder sous le poids du lierre. Il faut cependant être vigilant à ne pas le laisser atteindre le toit car il pourrait alors passer sous les tuiles du toit et les soulever ou tordre les chéneaux des gouttières.
  • Le lierre N’EST PAS un parasite : comme précisé plus haut, les crampons du lierre ne lui servent qu’à se développer et à se hisser sur différents supports. Il ne se nourrit que via ses racines et ne parasite donc pas les arbres et autres supports sur lesquels il se développe !

    © Stoelwinder / Biosphoto

> Autres avantages

Le lierre est une plante dépolluante qui absorbe notamment le benzène présent dans l’atmosphère. Il est aussi utilisé pour couvrir le sol : il limite le développement des plantes spontanées et permet de réduire votre consommation d’eau au jardin. Enfin, le purin de lierre est insectifuge et insecticide contre les aleurodes, acariens et pucerons. Vous pouvez également ajouter ses feuilles mortes à votre compost.

> Comment le favoriser ?

Le lierre est apprécié pour sa capacité à verdoyer même dans les zones les plus sombres du jardin. Il se contente de peu d’eau pour croître et pousse sur des sols très variés. Il est idéal pour couvrir un talus ou une clôture, et pour combler une haie ou la base d’un arbre. Habillez également vos vieux murets avec le lierre : ils sont le refuge de tant d’animaux ! Limitez néanmoins le développement du lierre sur de très jeunes ou très vieux arbres et plus particulièrement les arbres fruitiers qui le tolèrent mal. Il vous suffit de surveiller et de tailler le lierre au début de l’été pour qu’il ne gène pas le développement des arbres.

Si vous avez du lierre dans votre jardin, ne l’arrachez pas et profitez durablement de ses nombreux avantages ! Veillez juste à le tailler pour qu’il n’étouffe pas les arbres ou qu’il n’atteigne pas votre toit.

Si vous n’avez pas de lierre dans votre jardin, vous pouvez cueillir des baies bien noires de mars à mai chez un voisin ou dans les bois. Semez-les dans la foulée à 1 ou 2 cm de profondeur dans un godet. Si vous avez déjà des plants en godet, plantez-les au printemps en proportion de 1 à 3 par m². Aidez-vous pour cela de la fiche « planter une haie champêtre ».

Vous pouvez également créer des boutures en plantant en septembre des pousses terminales de lierre dans du terreau. Vous pourrez ensuite les transplanter au printemps.

Ainsi, le lierre se fait couverture isotherme de l’arbre et de la maison, engrais, refuge et garde-manger pour la faune sauvage, dépolluant, herbicide et insecticide naturel !

Alors pourquoi tant de haine ? Nous devrions le respecter et non pas le honnir.

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    1. Rémi

      Bonjour Philippe, merci pour votre réaction !
      Pour le cas des murs avec des joints en chaux, la littérature sur le sujet semble plutôt attirer l’attention sur la présence de fente ou de joints déjà dégradés qui pourraient être sensible au développement du lierre, même si ce dernier ne cherchera pas à « pénétrer » le mur mais bien à se hisser vers la lumière. A priori c’est plutôt l’état préalable du mur que la nature des joints qui est en cause. Avez-vous des références sur ce sujet ?
      Bonne journée à vous,
      Rémi.

      1. Philippe G

        Dans le bâti traditionnel ancien, la présence de joints un peu (voir beaucoup dégradés) n’est pas exceptionnelle. Le lierre finira par s’immiscer entre les pierres et dégradera finalement le bâtiment.
        Les références à ce sujet sont mon expérience personnelle de bâtiments anciens et celle de nombreux spécialistes de ‘Maisons Paysannes de France’. Je déconseille fortement de laisser grimper le lierre sur ce type de bâtiments.

        1. Rémi

          En effet, je vous rejoins sur le fait qu’il est préférable d’éviter de laisser du lierre se développer sur un bâtiment présentant des joints dégradés. Vous évoquez « Maisons Paysannes de France », y êtes-vous impliqué ?