Rats, souris, campagnols, … Nuisibles, vraiment ?

Que veut-on dire par nuisible ?

Volontairement inscrit entre guillemets, le terme de nuisible est relativement anthropocentré : une espèce nuisible est souvent qualifiée comme telle lorsqu’elle cause des dommages aux cultures, à la santé publique et aux activités humaines en général. Cet effet est, la plupart du temps, constaté après une rupture de la chaîne alimentaire par suppression des prédateurs, permettant la prolifération de proies et donc la raréfaction des ressources. Facilement employé en agriculture, ce terme ne fait aucunement mention de l’impact de l’espèce sur la biodiversité. Il faut pour cela différencier « espèce nuisible » et « espèce invasive », cette dernière s’adressant aux espèces souvent importées, adaptées et compétitives vis-à-vis des espèces endémiques du territoire d’origine.

La plupart des mammifères considérés comme nuisibles pour le jardin sont donc originaires de nos climats tempérés. Les problématiques associées aux jardins en ville et en campagne peuvent nous sembler radicalement différentes : d’un côté, un espace fragmenté par le bitume et les barrières, de l’autre, de plus larges surfaces en connexion parfois directe avec un champ, une forêt ou une rivière. En réalité, un certain nombre d’espèces, principalement les rongeurs dus à leur régime granivore ou omnivore, ont su s’acclimater à chacune des situations et tirer profit des ressources disponibles.

(Source : Mike Lane / Biosphoto)

Rat des villes, rat des champs

C’est souvent le premier animal qui nous vienne à l’esprit. Rongeur très proche des habitations, familier des égouts, historiquement porteurs de nombreux maux et des dégâts liés aux câbles électriques, le rat est un mammifère omnivore opportuniste aux incisives tranchantes et à l’intelligence rare. Néanmoins, au-delà des dégradations qu’il provoque, cet animal joue un rôle non négligeable dans le traitement des déchets domestiques. En raison de sa forte capacité de reproduction et d’absence de ses prédateurs (serpents, renards, rapaces…), il est vrai qu’il tend à pulluler aux abords notamment des poubelles et composts ! D’où la nécessité de ne pas mettre de pain qui l’attire immanquablement dans les composts des villes. Aujourd’hui, il existe de nombreuses mesures de lutte, souvent très agressives et parfois même dangereuses, traitant le problème à la conséquence et non à la source. La mise en place de grillage autour du compost, placé dans un endroit de faible passage mais néanmoins fréquenté devrait limiter la présence du rongeur. Et pourquoi ne pas proposer à son voisin amoureux des chats d’en adopter un ? Nul doute qu’il débarrassera tout le voisinage. Il paraît d’autre part que le rat n’apprécie guère l’odeur du ricin et des soucis. Enfin, la dernière solution consiste à accepter la présence des rats et surtout celle des petits mulots ou musaraignes avec lequel il est souvent confondu, jouant un rôle d’aérateur et de décomposition de la matière dans nos composts.

Souris, mulot, musaraigne et campagnol

Il est souvent compliqué de comparer ces espèces au premier coup d’œil. Petites, pas aussi gourmandes qu’on laisse à penser, ses espèces jouissent d’un statut d’omnivore plus ou moins large. Consommatrices de graines, insectes, racines, elles régulent normalement la biodiversité au jardin mais leur gestation et maturité sexuelle courte en font de véritables ravageurs en l’absence de prédateurs. Ces prédateurs sont difficiles à trouver en ville (serpents, rapaces, belette, renards, voir même lynx et loup…) mis à part pour le chat, mais vous pouvez néanmoins tenter de les appâter en leur installant des nichoirs. Dans le cas du campagnol, la destruction des galeries est envisageable dans le cas d’une importante pullulation. Aucune méthode ne fonctionne pourtant à 100% et il est nécessaire de porter une attention particulière aux méthodes sélectives, limitant les dommages causés aux autres espèces. L’une des meilleures méthodes consiste à cueillir les légumes racines à maturité et à les entreposer à l’abri de ces rongeurs et/ou à poser des pièges non mortels à vérifier quotidiennement et relâcher au loin.

(Source : Tesni Ward / Biosphoto)

Un jardin au naturel

Nous pourrions aborder un autre exemple, celui de la taupe, de la belette, voire des ragondins pour les familiers des cours d’eau, mais nombreux sont les articles à traiter ces sujets et à proposer encore et toujours plus de méthodes radicales et destructrices. Certaines font leurs preuves et nombreuses sont légitimes, réponse immédiate aux nombreux appels de détresse de jardiniers. Néanmoins, si ces espèces affectionnent tant nos jardins, pourquoi ne devraient-elles pas intéresser leurs prédateurs ? La prolifération finit par entraîner une régulation et bien que la destruction de ces « nuisibles » soit parfois nécessaire, il doit être absolument omis d’utiliser des poisons. Consommés par ces éventuels prédateurs ou d’autres espèces nécrophages, ils produiraient alors un double effet létal en circulant dans la chaîne alimentaire.

Pour conclure, bien qu’il semble parfois difficile de garder son calme face à une invasion, les méthodes naturelles, tels que les répulsifs (menthe, noyer) et les associations de plantes destinées à perturber l’odorat semblent faire progressivement leurs preuves.

Et pour les plus courageux, pourquoi ne pas songer à changer sa vision des choses et considérer leur présence non pas comme des nuisibles mais comme des auxiliaires ?

 

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