• Claire S a publié une note dans le jardin Logo du groupe Jardin de Claire :Jardin de Claire : il y a 7 ans et 2 mois

    Bonsoir à tous les heureux possesseurs d’arbres.

    Le jardin de Claire à Seltz, Jardin de Noé, n’est plus. Il est passé entièrement entre les mâchoires d’une tronçonneuse… plus d’une cinquantaine d’arbres ont été mis à terre… il reste un tilleul de 45 ans et un Magnolia soulageant, un orme, un Prunus « Shirofugen » du même âge… sur les 18 ares de terrain et les plus de cinquante qui avaient été plantés. Pratiquement tous les arbustes ont été rasés et les rosiers botaniques et anciens aussi…
    Nous avons dû vendre notre propriété, prenant les devants avant que notre âge ne nous rattrape. Nous nous sentons trompés par nos acheteurs. Venus avec un jardinier j’ai cru qu’ils allaient aimer et respecter le jardin, et surtout ses arbres à défaut d’y connaître quelque chose. Nous avons cédé notre bien en toute quiétude. Certes les nouveaux propriétaires n’étaient en rien obligés de perpétuer ce qui avait été entrepris mais à aucun moment je ne pouvais imaginer ce qui allait advenir de ces arbres.. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi ils ont acquis un jardin, il suffisait d’acquérir une maison sur un terrain nu… et il y en avait dans la commune. Le terrain est grand et peut recevoir une piscine ou une deuxième maison, mais rien ne justifiait qu’on rase tous les arbres plantés en périphérie. Si c’est pour une piscine et qu’ils ont eu peur des feuilles qui volent, ils auraient pu au moins garder les persistants. Donc, non, je ne peux comprendre un tel acharnement, un tel sacrilège. Ils n’ont même pas attendu le printemps sans doute de peur d’être séduits… trois mois après l’achat, tout était à terre, me laissant « atterrée » en l’ayant appris.
    Ces gens n’avaient visité qu’un bien et c’était le nôtre, dommage. Si nous avions eu plusieurs acquéreurs, ce n’est pas à ce couple que nous aurions vendu notre propriété… il suffisait de vendre au plus offrant. Mais cela faisait deux ans que nous espérions une visite, alors !!!
    Je ne comprends pas qu’on puisse, encore aujourd’hui, ignorer tous les bienfaits qu’un arbre peut apporter et encore moins qu’on puisse ne pas les aimer, pour leur puissance, la couleur de leur écorce, leur fleurs et leurs fruits, la forme et la couleur de leur feuillage, leur parfum, non je ne comprends pas cet irrespect pour la nature. Un arbre pour moi, est un personnage, si je ne vais pas jusqu’à leur parler, j’en parle beaucoup…
    Mon plaidoyer pour sa majesté l’arbre serait de voir un jour, paraître en France une loi qui protège les arbres urbains comme il en existe en Belgique, en Suisse, au Canada où une autorisation doit être demandé avant de les abattre. On y est puni de leur avoir porté atteinte de quelque façon que ce soit, si cette action a conduit à sa mort.
    Vous imaginez le temps qu’il a fallut à ces plantes pour atteindre leur taille. Je n’aurais pas été révoltée s’ils avaient détruit la maison, une maison se monte en un an, mais un arbre ! Les plus grands avaient plus de 12m mais d’autres comme les érables japonais n’avaient atteint que 2m en 45 ans. Je ne veux même pas parler de la collection constituée. S’ils avaient dû payer la valeur du terrain arboré peut-être auraient-ils réfléchi davantage, mais nous, nous n’aurions pas trouver preneurs.
    Tous ont été choisis, choyés, chouchoutés, élagués dans les règles de l’art (le moins possible) : pas de pesticide, pas d’engrais. Le jardin était devenu au moment où il avait été inscrit comme Jardin de Noé un écosystème équilibré : une bonne dizaine d’espèces de coccinelle, de syrphes, de nombreuses chrysopes, de nombreuses espèces de guêpes faisaient le ménage, et même la mante religieuse y avait élu domicile depuis le réchauffement climatique. Tout ce beau monde, avec les petits mammifères (musaraignes, belettes, fouines et hérissons), s’était allié pour lutter contre les prédateurs des arbres et du jardin. Plus d’une dizaine d’abeilles sauvages butinaient allègrement dès mars jusqu’à ce qu’un voisin ait eu l’idée de mettre des ruches dans le lotissement. Ces voraces ne laissaient rien aux sauvageonnes. Seules les petites Osmia qui ne souffraient d’aucune concurrente en février-mars alors qu’elles visitaient bruyères et crocus… prospéraient encore au jardin avec les grosses charpentières… les autres se sont malheureusement raréfiées. Ce n’est pas la flore du jardin qui avait changé si ce n’est les plantes locales qui s’y invitaient de plus en plus généreusement. Les détrivores de toutes sortes, des coléoptères nombreux eux aussi et même des lucanes qui avaient trouvées une souche de merisier tombé à terre, la Rosalie des alpes et tant d’autres butinaient à côté des abeilles… je ne citerait pas les oiseaux qui égayaient tout le lotissement, nombreux en espèce mais se raréfiant eux aussi tout comme les papillons.
    Toute cette vie grouillante va disparaître faute de gîte et de couvert, et ce n’est pas dans le lotissement qu’il vont trouver refuge tant il manque d’arbres et de jardin sans pesticides. Les espaces naturels se sont raréfiés tout autour.
    J’enrage devant tant d’ignorance et elle a malheureusement encore de beaux jours devant elle. Les Jardins de Noé ont encore bien du travail pour y remédier. Et j’espère pouvoir être avec vous tous encore longtemps car si le Jardin de Claire n’est plus, un autre est en train de naître en Bretagne que j’espère pouvoir un jour partager comme je le faisais avec le jardin de Claire.
    Le jardin est mort vive le jardin !